DIX TENDANCES POUR UN MONDE CARBONEUTRE

03. Main-d’œuvre : force de la nature

Pendant que l’économie mondiale émerge de sa récession causée par la pandémie, l’équilibre du pouvoir sur le marché du travail a résolument changé en faveur des travailleurs. À la fin de juillet 2021, près de 11 millions d’emplois étaient vacants aux États-Unis, près du double de l’année précédente1. En août, les travailleurs quittaient leur emploi à une vitesse sans précédent2. L’ère de la « Grande démission » est amorcée3, avec des travailleurs qui cherchent à aligner leur travail et leur vie personnelle de façon à maintenir le train de vie apparent apporté par la pandémie4. En hausse fulgurante parmi les critères recherchées chez l’employeur, il y a l’engagement marqué envers les actions pour le climat.

Les actions pour le climat seront déterminantes pour attirer les talents

Collectivement, la génération Z, âgée de moins de 25 ans et qui commence sa carrière, décidera de l’avenir du travail. Selon une étude, près de 9 personnes sur 10 de ce groupe s’inquiète de la santé de la planète5, et une plus forte proportion croit que les marques ont l’obligation de prendre position sur les questions environnementales6. Or, 60 % ne croient pas que les leaders en affaires en font suffisamment dans ce domaine7.

C’est une situation précaire pour les employeurs qui cherchent de jeunes talents, puisqu’il semble que cette génération est sincèrement prête à faire passer son épanouissement personnel et son sens éthique avant sa sécurité financière dans sa recherche d’emploi. Plus des trois quarts des ces jeunes disent qu’il est important de travailler pour une entreprise qui partage leurs valeurs, avec en tête les actions contre les changements climatiques8. Dans le monde des affaires, une réputation de leader climatique sera bientôt un atout de recrutement incontournable9.

Dans le monde des affaires, une réputation de leader climatique sera bientôt un atout de recrutement incontournable.

LES PLUS GRANDES PRÉOCCUPATIONS SELON L’ÂGE

Bien sûr, les travailleurs veulent aussi travailler pour des entreprises florissantes et les données indiquent qu’une attention aux émissions de carbone est bonne pour les affaires. Par exemple, les entreprises qui constituent l’index technologique du climat de l’organisme Energy Impact Partners (EIP)10 ont surpassé le marché de 280 % entre mars 2020 et 202111. Parallèlement, d’autres études ont indiqué que les entreprises produisant moins d’émissions ont des employés plus satisfaits, en plus d’être plus attrayantes pour de futurs employés12.

INTENSITÉ MOYENNE DES ÉMISSIONS DE CARBONE DES EMPLOYEURS

Les employeurs s’adaptent déjà à ce changement et y contribuent, d’ailleurs. Plus de 1 000 entreprises se sont inscrites à l’initiative Science Based Targets13. Et la campagne Objectif Zéro des Nations unies, en plus de son engagement avec les gouvernements locaux, les investisseurs et les institutions d’enseignement, compte 3 067 entreprises inscrites, chacune d’entre elles s’étant engagée à éliminer son empreinte carbone d’ici 2050 au plus tard. Au total, cette initiative couvre 25 % des émissions de carbone mondiales et 50 % du PIB mondial14. On observe également un nombre grandissant d’entreprises à but lucratif qui s’engagent par des normes sociales et environnementales en obtenant la certification B Corps. Alors que les B Corps étaient là avant la crise climatique, on en compte maintenant plus de 4 000 dans 153 industries et 77 pays qui cherchent à harmoniser les profits et le sens éthique15, pas seulement en paroles, mais aussi en termes juridiquement contraignants.

Verdir l’expérience en milieu de travail

Une grande partie de l’impact environnemental d’une entreprise est reliée aux lieux et espaces qu’elle occupe. C’est aussi dans le lieu de travail que les employés vivent cet impact de façon tangible par son emplacement, son aménagement, sa consommation d’eau et d’énergie et ses moyens de disposer des déchets16. Les entreprises qui veulent recruter et retenir les meilleurs talents comprennent que leur environnement de travail doit plaire aux travailleurs sensibilisés à la cause environnementale.

Les employeurs reconnaissent aussi l’importance de l’emplacement dans leur stratégie de recrutement. Avant la pandémie, les grandes villes du monde étaient un aimant pour les talents, attirant les jeunes travailleurs de contrées lointaines. Les raisons de croire que ce sera longtemps le cas ne manquent pas, notamment les actions collectives pour le climat qu’on y observe. L’accès piétonnier aux transports publics et aux espaces verts, combiné aux initiatives de réduction d’émissions dans les immeubles en milieu urbain, donne à la génération Z un endroit où vivre et travailler plus respectueux du climat. Un nombre important de travailleurs a récemment décidé de déménager pour changer de vie dans l’optique de travailler davantage à distance, nous devrions voir plus de gens choisir leur lieu de vie en fonction de leur impact environnemental17. Citons des villes comme Austin, San Francisco, Washington D.C., Bristol, Vienne et Munich18,19 qui se font une réputation attrayante en raison de leur leadership en matière de climat20.

En plus de l’emplacement, les lieux de travail eux-mêmes ont longtemps été une partie intégrante de la stratégie de recrutement. Maintenant, les entreprises priorisent la création d’un environnement de travail selon l’Élément X21 pour attirer les meilleurs talents, un milieu conçu selon l’humain, les technologies et la flexibilité, mais de façon à réduire leur empreinte carbone.

Un milieu de bureaux bien pensé offre aux travailleurs un éventail d’avantages durables qui dépassent les bonnes intentions en termes d’engagement à réduire les émissions. Comme le dit Jane Henley, chef de la direction du World Green Building Council, le dit, « un nombre grandissant d’études démontrent le lien entre les immeubles durables et l’amélioration de la santé, de la productivité et de l’apprentissage de ceux qui les occupent »22. Ces changements bénéficient à la fois les travailleurs et leurs employeurs. Par exemple, on note une augmentation de 101 % des scores cognitifs pour les employés de bureaux verts et bien aérés, et une amélioration de 12 % de la productivité quand les immeubles donnent aux employés une vue sur un environnement naturel23. On peut s’attendre à ce que ces facteurs attirent les meilleurs talents, au point où le zéro carbone deviendra un composant essentiel des lieux de travail de l’Élément X.

Durable à distance?

Toutefois, alors qu’ils entrent dans un monde du travail post-COVID, les employés font face à un nouveau défi24,25. Tout comme les milieux professionnels à haute performance sont devenu un argument de recrutement au cours de la dernière décennie, c’est aujourd’hui la flexibilité de travailler à distance qui fait partie de la stratégie de nombreuses entreprises26. Bon nombre d’organisations à la tête de leur industrie ont annoncé leur plan de recourir à un modèle hybride, avec des employés qui divisent leur temps entre les locaux de l’entreprise et leur bureau à distance27. À première vue, on pourrait croire que la réduction des déplacements réduit l’empreinte carbone28, mais la réalité est plus complexe29,30.

Les travailleurs à la maison utilisent plus de services publics lorsqu’ils sont présents toute la journée31, et ils ont tendance à utiliser la voiture davantage pour faire des courses, ce qui diminue les épargnes en carbone du télétravail. D’ailleurs, les télétravailleurs peuvent choisir de vivre plus loin des grands centres, dans de plus grandes maisons et avec une plus grande dépendance à la voiture. En effet, plus de gens sont déménagés à la campagne pendant la pandémie, et il faut le préciser puisque les données américaines32,33 et britanniques des émissions de carbone par habitant sont plus élevées dans des endroits de faible densité34.

Si les télétravailleurs et les travailleurs flexibles prennent plus souvent l’avion pour affaires (ex. : pour des réunions périodiques de l’entreprise), leur empreinte carbone peut être supérieure à ce qu’elle aurait été s’ils s’étaient déplacés au travail régulièrement. Une étude démontre qu’un vol intérieur de 500 kilomètres produit 15 fois les émissions d’un déplacement en véhicule de 50 kilomètres avec un seul passager35. Une autre démontre que l’ajout d’un voyage d’affaires avec vol chaque année annule facilement une journée additionnelle de télétravail chaque semaine36. De plus, dans certains cas, les télétravailleurs et travailleurs flexibles utilisent à la maison des énergies moins durables et les utilisent moins efficacement qu’ils le feraient dans un environnement de travail attentif au carbone.

Les émissions des télétravailleurs font partie de l’empreinte carbone générale d’une entreprise, et les organisations cherchant à éliminer leur empreinte devront en tenir compte37.

Pour rencontrer leurs objectifs de réduction de carbone, et changer notre façon de travailler, les entreprises devront penser au-delà de leurs limites actuelles en carbone38. Elles devront permettre à leur main d’œuvre d’être durable au lieu de simplement fournir un milieu durable. Des outils existent déjà pour aider les entreprises à penser à l’empreinte de leurs télétravailleurs39 avec une importante évolution prévue dans les prochaines années alors que l’attention des entreprises sera davantage axée sur cette question. Pour l’instant, nous pouvons nous attendre à une variété d’offres possibles d’employeurs pour gérer les émissions de la main d’œuvre hybride :

  • Subventionner le transport collectif (au lieu du stationnement) et/ou l’achat de véhicules électriques;
  • Permettre l’évaluation énergétique des résidences ainsi que les incitatifs pour les rénovations et l’utilisation d’énergie renouvelable;
  • Récompenser le kilométrage et la consommation énergétique réduits à l’aide de comptage volontaire;
  • Envisager des horaires de bureaux saisonniers selon la géographie pour encourager le travail en présentiel lors de saisons où le télétravail crée plus d’émissions de carbone.

La bataille pour les talents après la pandémie encouragera les employés à montrer une authentique conscientisation à la durabilité. Nous entrons dans une ère où le travail flexible jouera un rôle plus important dans le monde des affaires et les entreprises devront élargir leur définition et leur évaluation de ce que c’est que d’être écologique.


1https://www.bls.gov/news.release/jolts.nr0.htm 2https://www.bls.gov/news.release/jolts.nr0.htm 3https://hbr.org/2021/10/with-so-many-people-quitting-dont-overlook-those-who-stay 4https://www.fastcompany.com/90658815/this-is-the-new-battleground-in-the-fight-to-retain-employees 5https://www.conecomm.com/research-blog/cone-gen-z-purpose-study 6https://corporate.myunidays.com/hubfs/Infographics/UNiDAYS-What_Makes_GenZ_Fall_in_Love_with_a_Brand.pdf 7https://www2.deloitte.com/global/en/pages/about-deloitte/articles/millennialsurvey.html 8https://www2.deloitte.com/content/dam/Deloitte/us/Documents/consumer-business/welcome-to-gen-z.pdf 9https://www.edelman.com/sites/g/files/aatuss191/files/2021-01/2021-edelman-trust-barometer.pdf 10https://eipclimateindex.com/ 11https://techcrunch.com/2021/03/11/energy-impact-partners-has-set-up-an-index-for-climate-tech-and-its-crushing-the-overall-market/ 12https://www.marshmclennan.com/content/dam/mmc-web/insights/publications/2020/may/ESG-as-a-workforce-strategy_Part%20I.pdf 13https://sciencebasedtargets.org/companies-taking-action 14https://unfccc.int/climate-action/race-to-zero-campaign 15https://bcorporation.net/ 16https://bimpactassessment.net/?_ga=2.202982545.1063159809.1632909795-2024400231.1630513226 17https://thegreencities.eu/themas/climate/ 18https://www.insider.com/greenest-us-cities-2018-5 19https://www.gvi.co.uk/blog/top-5-green-cities-world/ 20https://www.ebrdgreencities.com/ 21Voir l'Élément X par Avison Young 22https://www.worldgbc.org/news-media/building-business-case-health-wellbeing-and-productivity-green-offices 23https://www.worldgbc.org/news-media/building-business-case-health-wellbeing-and-productivity-green-offices 24https://www.avisonyoung.com/en_GB/x-factor 25https://avison-young.foleon.com/corporate-marketing/multiverse/summary/ 26https://www.avisonyoung.com/experience/corporate-marketing/multiverse/paradox/ 27https://avison-young.foleon.com/corporate-marketing/global-occupier-analysis/home/ 28https://www.bbc.co.uk/news/uk-scotland-57016421 29https://www.theguardian.com/environment/2021/aug/02/is-remote-working-better-for-the-environment-not-necessarily 30https://www.bloomberg.com/news/articles/2021-03-29/is-telecommuting-really-greener-it-depends 31https://www.telegraph.co.uk/columnists/2021/09/23/dial-generation-z-embrace-jumpernomics-instead-overheating/ 32Par exemple, dans les zones métropolitaines denses comme New York, la famille urbaine moyenne consomme plus de 300 gallons d'essence de moins par an que ses homologues de banlieue. Voir : Glaeser, E. & Kahn, M. (2003). Sprawl and Urban Growth. Handbook of Regional and Urban Economics. 33Ribeiro, H.V., Rybski, D. & Kropp, J.P. (2019). Effects of changing population or density on urban carbon dioxide emissions. Nature Communications, volume 10. https://doi.org/10.1038/s41467-019-11184-y 34https://www.nature.com/articles/s41467-019-11184-y/figures/1 35https://www.bbc.com/news/science-environment-49349566 36https://watershedclimate.com/wfh-calculator 37https://www.carbontrust.com/resources/briefing-what-are-scope-3-emissions 38https://www.mandg.com/dam/investments/institutional/shared/documents/insights/2021/q1/our-real-estate-journey-to-net-zero-final-global.pdf 39https://watershedclimate.com/blog/decoupling-work-from-carbon

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